Les défis géopolitiques sont considérables alors que les guerres se rapprochent du territoire européen et que l’architecture internationale des années 1945-1950 s’effrite jour après jour.
Les progrès de l’Union européenne dans les domaines de politique étrangère et de défense ne pourront advenir sans l’implication et l’engagement des États membres. C’est une leçon que Robert Schuman nous a léguée.
Pour faire face à l’aggravation de la situation internationale, l’action extérieure de l’Union européenne devrait être indépendante de la Commission et tous les services qui y contribuent rattachés à un Service diplomatique commun relevant, dans un premier temps, du Conseil européen. Le Haut Représentant pour les affaires étrangères et la politique de sécurité y gagnerait en prérogatives et l’actuel titulaire de cette fonction, Josep Borrell a fait la preuve qu’une voix européenne forte peut s’exprimer pourvu qu’elle soit unique.
Car les querelles entre institutions devraient s’effacer devant la gravité de la situation internationale.
S’il veut vraiment être le représentant légitime de la volonté populaire des Européens, le Parlement européen doit accepter que sa représentativité soit un jour réellement démocratique et qu’un député européen représente le même nombre de citoyens à Malte qu’en Allemagne. C’est hélas loin d’être le cas. Il y gagnerait pourtant en légitimité, notamment auprès des Cours constitutionnelles européennes, et pourrait alors plus librement se préoccuper de questions de souveraineté comme la politique étrangère ou la défense. En attendant, il ne devrait pas interférer dans la résolution des grandes questions stratégiques que doit surmonter l’Europe et qui engagent la responsabilité des États membres.
Quant à elle, la Commission ne devrait pas se mêler de politique étrangère et cesser de contribuer au mélange des genres avec des États fondés à organiser eux-mêmes, notamment sur le plan démocratique, le difficile passage de politiques nationales par trop dispersées en coopérations européennes indispensables. En empiétant sur les prérogatives des États, qui résistent à ces intrusions, la Commission ne contribue pas à une politique étrangère et de défense commune.
Les États, pour leur part, devraient imaginer de nouvelles formules de coopérations plus étroites pour ces sujets fondamentaux. Un conseil de défense ? Un organe chargé de leur sécurité collective ? Un accord intergouvernemental renforçant leur solidarité ? Plusieurs formules peuvent voir le jour sous l’empire de la nécessité.
Beaucoup de ces évolutions relèveraient de modifications de la pratique actuelle plutôt que de réformes des traités. Nombre d’entre elles ont été identifiées qui concernent la gouvernance européenne. Elles contribueraient à une meilleure efficacité des politiques européennes et renforceraient surtout, par les clarifications qu’elles apporteraient, le sentiment d’appartenance des citoyens à un ensemble politique efficace qui pèse et existe sur la scène internationale.
Avant même une révision des traités, c’est donc une véritable revue de détail et des changements dans la pratique quotidienne des responsabilités européennes, qui pourraient le mieux préparer l’Union européenne à son éventuel élargissement.