Depuis le 23 juin 2016 où, par référendum, les Britanniques ont décidé à une faible majorité (51,9%) de quitter l’Union européenne, le débat fait rage outre-Manche sur les liens qu’ils souhaitent conserver avec le continent.
Après des années d’hostilité, de combats d’arrière-garde, de déni et de discours méprisants, ils avaient été contraints de rejoindre les succès d’une Europe qui s’intégrait. Mais leurs dirigeants se sont bien gardés de le dire à leurs concitoyens. Ils feignent aujourd’hui d’en découvrir les vertus et nulle part en Europe on ne vante avec autant de superlatifs le marché unique, la coopération de défense, le mandat d’arrêt européen, les fonds structurels et bien d’autres mécanismes communautaires, générateurs de sécurité, de croissance et d’emplois. Ils disposaient d’un statut à part, qui tenait compte de leurs spécificités insulaires et historiques. Ils voudraient le conserver.
En fait, ils tentent d’expliquer aux citoyens que, bien sûr, ils vont sortir de l’Union, mais qu’il serait dans leur intérêt de décider « souverainement » d’y rester attachés et « le plus proche possible » (David Davis, ministre du Brexit).
La responsabilité des élites britanniques est totale. En cachant la réalité de leur appartenance à l’Union derrière les non-dits d’une nostalgie contraire au traditionnel pragmatisme du Royaume-Uni, en suivant les sirènes amères du populisme le plus vulgaire, elles ont conduit leur pays en bien mauvaise posture et les effets anticipés de cette erreur historique se font déjà sentir dans le panier de la ménagère comme dans les finances de l’Etat.
Les 27 pourtant n’ont pas sombré dans l’esprit de revanche ni la tentation de la punition. Plus responsables, ils essayent d’aider ce partenaire européen en difficulté à clarifier ce qu’il désire. Le marché unique européen, ce sont des règles décidées en commun dont on confie la surveillance à un organe supra-national, la Commission européenne, et la sanction à une instance judiciaire indépendante, la Cour de Justice. Y adhérer est un acte souverain qui ne peut renoncer à aucun de ces trois piliers sous peine d’affaiblir une construction d’ensemble qui fonctionne, structure et soutient nos économies, renforce les liens entre les peuples et organise la solidarité entre ses membres.
Il n’y aura donc pas d’autre alternative que partir ou rester, qu’abandonner les bénéfices de l’appartenance à l’Union ou les garder, restant dehors, mais en appliquant toutes ses règles. Toute formule se négociera donc, hélas, au détriment des Britanniques, mais jamais au prix de l’affaiblissement d’un ensemble qui a réussi. Et gageons qu’ils feront preuve de raison et qu’ils se convaincront des erreurs commises.
C’est une leçon pour nous: soyons fiers de cet espace de paix, de liberté et de prospérité que nous avons construit, lucides bien sûr sur son inachèvement, mais honnêtes sur ses succès et engagés pour son amélioration, sa défense et sa promotion. Les Européens, champions du doute et jamais loin de la repentance peuvent réussir ensemble des exploits réputés impossibles! Pacifier et reconstruire un continent démocratique où il fait bon vivre et dont l'avenir est prometteur en est un. Notre premier devoir est d’en être fiers et, pour une fois, de ne pas douter.