L'Irlande ramène l'Europe dans la crise financière.
Certes l'Union a les moyens de sauver de la banqueroute ce mauvais élève de la classe européenne. Car les difficultés irlandaises ne sont pas seulement dues à ses banques, mais bien à la politique économique et fiscale de son gouvernement.
Voila un pays, qualifié il y a peu encore, de "tigre celtique", qui a construit sa croissance des dernères années, en solitaire, aux marges de l'Union, comme une porte d'entrée sur le marché intérieur européen. Une fiscalité digne d'un paradis fiscal exotique (12,5% d'impôt sur les sociétés), une absence de régulation bancaire sérieuse, une politique économique de cow-boys ont ainsi réussi, dans un premier temps, à attirer sur son territoire un flot d'implantations grâce à un code d'investissements qui relève davantage du dumping que de la normalité européenne. Mais cette croissance artificielle n'a pas généré les recettes escomptées. Les conséquences d'un tel laxisme étaient inévitables: bulle immobilière, surchauffe et croissance artificielle du niveau de vie. Puis vint l'heure de vérité dans la crise, avec l'effondrement des prix immobiliers, des foyers endettés, 14% de chômeurs et des banques étranglées sous perfusion de la Banque centrale européenne (jusqu'à 130 milliards d'Euros avancés). Le gouvernement irlandais a garanti l'ensemble du système bancaire, soit un engagement de 480 milliards d'Euros, c'est-à-dire trois fois son PIB (164 milliards) ce qui le conduit à un déficit public de 32%!
Il réclame aujourd'hui la solidarité européenne qu'il n'a jamais vraiment pratiquée.
Chaque fois que les Etats membres ont voulu rapprocher leurs fiscalités, condition nécessaire d'une meilleure gouvernance de la zone Euro, l'Irlande s'y est opposée. Bloquant souvent les décisions de ses pairs, elle a été un obstacle vers une intégration plus poussée des économies européennes, de ses politiques budgétaires, de sa fiscalité, de sa gouvernance, de sa sécurité, de ses institutions, bref autant de signaux forts qui auraient pu être donnés à l'extérieur et contribuer à accroître la confiance dans l'Euro dont elle a pourtant beaucoup bénéficié.
Aujourd'hui elle veut le beurre et l'argent du beurre. L'Union européenne ne doit pas accepter de l'aider à n'importe quel prix et remettre de l'ordre dans la maison, n'en déplaise à l'ombrageux sentiment national irlandais. L'Irlande devra démontrer que son sauvetage est nécessaire à l'Euro et à l'Europe. Elle devra accepter de s'aligner sur les pratiques européennes et renouveler son engagement à poursuivre collectivement une plus forte intégration politique, économique et budgétaire.
L'Union ne peut plus faire l'économie d'une régulation bancaire partagée et renforcée, d'un contrôle de la fiscalité, des politiques économiques et des budgets nationaux, c'est-à-dire d'une véritable gouvernance de l'Euro. On espère que les grands argentiers auront à coeur de lui rappeler cette exigence qui doit être désormais, pour elle comme pour tous, une ardente obligation.