Assurément l’Europe doit relever dans les mois qui viennent des défis considérables et nombreux. Au premier de ceux-ci figure sa sécurité. Jamais depuis 1950 elle n’a été à ce point mise en cause. Nous avions oublié que, riveraine du monde, elle ne saurait échapper aux grandes évolutions géopolitiques. Et nous avions pensé que la paix revenue chez nous s’étendrait naturellement à notre voisinage et plus loin encore.
Il en a longtemps été ainsi. Ce n’est plus le cas. Conflits, terrorisme, interventions militaires, réfugiés, murs et barrières, instabilité et volatilité économiques ramènent l’Europe aux dures réalités d’un monde balloté par des bouleversements fascinants.
Faut-il pour autant cultiver cet étrange rapport existentiel au doute qui caractérise les Européens? Au vu de ces évolutions, trop nombreux sont ceux qui remettent tout en cause, à commencer par les incontestables acquis de l’unification européenne. Nombreux sont aussi ceux qui, animés d’une belle conviction, se contentent d’affirmer, sans être précis et dire où et comment, qu’il faut « plus d’Europe ». Ni les uns ni les autres ne paraissent crédibles aux opinions européennes, qui aimeraient être fières d’une pourtant si belle histoire.
Ce qui est nouveau en Europe, c’est le retour du doute sur le continent de Descartes. Attisé par nos rivaux, il satisfait la facilité et le caractère moutonnier d’élites fatiguées. Certains en sont des spécialistes séculaires, comme les Français, d’autres des utilisateurs opportunistes comme les Britanniques, d’autres enfin des observateurs passifs, mais utilitaristes. Car il est vrai que l’intégration européenne doit prouver chaque jour son utilité et, désormais, démontrer son apport à des dirigeants à l’esprit rendu confus par la dynamique, la complexité du changement et de la menace sécuritaire.
Le doute est une valeur positive lorsqu’il pousse à être meilleur, à inventer de nouvelles solutions par l’imagination, la créativité et le concret. Le doute est une valeur négative lorsqu’il conduit au pessimisme et, finalement à « baisser les bras ». Entre les deux, le travail quotidien, difficile et proche des citoyens, mû par de solides convictions forgées dans la réflexion stratégique de long terme, est la seule voie conforme à l’intérêt général. Celui de nos nations et de l’Homme européen.
C’est le devoir de l’Union européenne en 2016. Dans cette année charnière, elle doit s’adapter à cette priorité absolue et s’efforcer pour cela de sortir de la bulle bruxelloise. Ses acteurs, à commencer par les gouvernements nationaux, doivent maintenant assumer politiquement leurs choix collectifs européens, accroître leurs efforts de défense et renforcer la coopération en Europe. Il en va de sa sécurité. Tout repli national serait criminel et son prix extraordinairement lourd.
Devant ces nouveaux défis, il n’y a pas lieu de douter de ce que nous sommes, de ce que nous avons déjà accompli et de nos capacités à réussir. Reste la volonté…
Bonne année 2016!